Cliquez ici pour afficher normalement la page (avec mise en forme et graphisme). Si ça ne fonctionne pas, vérifiez que votre navigateur accepte JavaScript et supporte les CSS. Nous vous recommandons un navigateur respectant les standards, tel que : Google Chrome, Firefox, Safari…
Description très précise de nibbāna, qui est sans aucun doute l’objet le plus méconnu et le plus indescriptible qui soit.
Réalisation finale
Cessation des éléments
L’une des 4 réalités ultimes
Obtenu après avoir discerné et surpassé la réalité ultime nāma rūpa
Expérimenté lorsque la connaissance vipassanā est mature
Non-soi permanent et paisible
Non un lieu
Pour Bouddha, il existe une possibilité de parvenir à l’extinction complète de l’apparition de ces phénomènes, pour qu’ils CESSENT d’apparaître, pour que les agrégats CESSENT d’apparaître. Toutefois, cette disparition n’entraînera pas le néant. Il doit donc y avoir quelque chose à ce moment-là, quelque chose de réel, un autre phénomène, une autre catégorie de phénomènes. C’est ce que Bouddha a découvert. Il a découvert que lorsque ces agrégats cessent d’apparaître, il y a quelque chose. C’est cette découverte qu’il fit sous cet arbre, qu’on appelle arbre de l’éveil, car il qualifie cette expérience d’éveil. Il a vu apparaître les agrégats et il a vu ce qui se passe lorsqu’ils cessent d’apparaître. Il a vu que ça n’est pas du tout l’annihilation ou le néant.
Prenons l’exemple d’une vague d’eau qui se meurt sur la plage. Lorsque cette vague d’eau se meurt sur la plage, l’eau n’a pas disparu, la plage n’a pas disparu, le sable n’a pas disparu, les rochers n’ont pas disparu. Néanmoins la vague a disparu. Prenons l’exemple du feu qui s’éteint. Lorsque le feu s’est éteint, les cendres n’ont pas disparu, les pierres autour des cendres et la chaleur émise par le feu n’ont pas disparu non plus. Néanmoins le feu a disparu, il n’y a plus de feu. Cependant, tout est encore là. Les arbres alentour et les cailloux sont encore là, mais le feu s’est éteint. De la même manière, lorsqu’on éteint la lumière dans une pièce, même si on ne voit plus rien, rien n’a disparu. Cela dit, la comparaison s’arrête là. Elle a ses limites.
Ce que Bouddha a expérimenté est la cessation complète de toutes les visions, auditions, olfactions, gustations, touchers et, chose nouvelle, de toutes les connaissances mentales, en fait, de toutes les perceptions. C’est-à-dire que là où certains nous parlent de connaissance transcendante, de connaissance exaltée, de connaissance illimitée, Bouddha lui, franchi un pas de plus, il est arrivé à observer la disparition de cette connaissance, la disparition de cette conscience. Là où on nous parle de dieu, il a vu le non-dieu. Là où on nous parle de la « bouddhéité », il a vu son absence, il a vu sa disparition. Là où on nous parle de nirvâna, il a vu l’absence de nirvâna. Là où on nous parle de l’état transcendant, de l’état ultime, de l’état d’omniscience, de l’état d’éveil, il a vu tout cela disparaître. Alors que reste-t-il ?
Ce qui reste est plutôt inqualifiable, mais c’est bel et bien quelque chose. C’est tellement quelque chose qu’il le met dans la catégorie des choses qui constituent cet univers. Il dit que cet univers est constitué de quatre choses, qui sont universelles. Elles sont universelles en ce sens qu’elles apparaissent partout, qu’elles sont partout et qu’elles peuvent être connues partout. Il y a tous les phénomènes matériels, que l’on appelle au sens large la matière. Il y a tous les phénomènes mentaux, toutes ces perceptions, sensations, idéations, conceptions, etc. Il y a la conscience, qui justement, a la faculté de connaître ces phénomènes matériels et ces phénomènes mentaux. Enfin, il y a cette quatrième chose qui en est une et qui est bel et bien une réalité. C’est une chose que nous ne voyons pas. Nous ne la voyons pas parce que nous entendons des sons, parce que nous voyons des images ou parce que nous faisons des expériences spirituelles, mystiques ou transcendantes. Nous ne la voyons pas parce que nous sommes conscient de quelque chose. De quoi sommes-nous conscient ? Nous sommes conscients des phénomènes matériels et des phénomènes mentaux.
La souffrance existe, mais on ne trouve personne qui souffre ;
L’acte est accompli, mais il n’y a pas d’acteur ;
Nibbàna existe, mais pas celui qui y entre ;
Il y a une voie, mais personne n’y chemine.
Lorsque se produit la cessation de l’apparition des agrégats, à ce moment-là subsiste cette quatrième chose que l’éveillé Bouddha a découverte. Il l’a appelé nibbāna, pas nirvâna. Il a bien employé le mot nibbāna. Ce n’est pas un hasard s’il l’a fait. Il a employé un mot que personne n’employait de son temps. Certains essayerons de traduire nibbāna en disant que cela veut dire l’absence d’attachement, le souffle qui a été interrompu ou que sais-je. Il est tout à fait inintéressant de chercher à traduire ce mot. Il a bien fallu qu’il emploie un mot parce que c’est bien une chose. Étant donné qu’il s’agit d’une chose, il est opportun d’employer un terme pour la désigner.
Très souvent, on nous dit que l’état d’éveil, c’est innommable, c’est ineffable, ça transcende tout. Alors taisez-vous ! De quoi parlez-vous ? Bouddha n’a jamais dit que c’était une transcendance, que ça transcendait le concept, que ça transcendait tout. Il dit tout simplement : « C’est un des quatre constituants de l’univers. » Il lui donne un nom, qui est nibbāna. Il a choisi d’employer le même nom que celui que l’on emploie pour désigner le riz qui est sorti de l’étuve lorsqu’il refroidit, ou celui des cendres qui refroidissent après l’extinction d’un feu. Il emploie un nom que l’on emploie dans le langage de tous les jours. On dit par exemple du riz qui refroidit : « Où est le riz ? Le riz est en “nibbāna”. »
Ainsi, comme il le faisait toujours, Bouddha employait un terme de tous les jours. Il a refusé d’employer le vocabulaire technique des religieux, des prêtres, des maîtres spirituels. Il employait le langage de tous les jours, le langage de la cuisinière, du chasseur, du boucher ou du laboureur.
Il a donc enseigné qu’il y a ces quatre choses qui constituent l’univers.
Ce que nous appelons la conscience, les phénomènes mentaux et les phénomènes physiques, ce sont les cinq agrégats.
En fait, lorsqu’on parle des « cinq agrégats », c’est juste une manière différente d’énoncer. Tantôt on les énonce comme étant deux catégories (d’un côté les phénomènes physiques et de l’autre les phénomènes mentaux), tantôt on donne trois catégories (la conscience, les phénomènes matériels et les phénomènes mentaux), tantôt on donne cinq catégories (les cinq agrégats), tantôt on en donne encore plus. On dit qu’il y a vingt-huit propriétés matérielles, qu’il y a cinquante-deux propriétés mentales, (etc.) On peut subdiviser, les contemporains de Bouddha ne s’en sont pas abstenus. On peut regrouper tout cela en trois : La conscience, les phénomènes matériels et les phénomènes mentaux. Puis il y a quelque chose qui sort de cette catégorie, de cette liste, qui est : nibbāna (ou parinibbāna). C’est cela que le Bienheureux a découvert.
À chaque fois que la conscience apparaît, elle est complètement verrouillée sur son objet, elle est fixée, figée sur son objet. On appelle cela upadāna, la fixation. De la même manière que lorsqu’on jette une boulette de pain sur une vitre, comme nous le faisions quand nous étions enfants, elle va rester collée sur la vitre. Ce qui fait que la boulette de pain est collée sur la vitre, c’est upadāna. Lorsqu’on applique un « post-it » par exemple, c’est upadāna qui fait que le « post-it » reste collé.
De la même manière, la conscience reste collée sur son objet. C’est tout à fait naturel, c’est comme ça que cela fonctionne. Même un être pleinement libéré comme le Bienheureux, bouddha éveillé, lorsqu’il était conscient, lorsqu’il parlait, lorsqu’il marchait, cela était la conscience qui était fixée sur son objet (upadāna). La conscience a une telle faculté de coller à son objet que même lorsque Bouddha a expérimenté la cessation complète des cinq agrégats, la conscience a continué d’apparaître. Même si nibbāna est un objet bien particulier, il n’empêche que c’est un objet et c’est précisément pour cela qu’il peut être lui aussi connu de la conscience.
Ainsi, lorsque les cinq agrégats ont cessé d’apparaître, aussitôt après, la conscience se projette de nouveau. Comme il n’y avait plus de phénomènes matériels et de phénomènes mentaux à connaître, elle s’est projeté sur ce qui reste. Ce qu’il reste, c’est nibbāna. C’est ainsi que Bouddha s’en est souvenu. C’est ainsi qu’il a pu parler de nibbāna. Car s’il avait seulement perdu conscience, comment aurait-il pu dire qu’il a connu nibbāna ? On ne peut pas connaître nibbāna dans l’inconscient, pour le connaître, il faut être conscient. Il a donc VU nibbāna, il a CONNU nibbāna, il a touché nibbāna.
Il a connu nibbāna lorsque la conscience a arrêté de se fixer sur ces objets, qui apparaissent et qui disparaissent sans cesse. Aussitôt que la conscience a arrêté de se fixer sur ces objets, elle s’est projeté sur nibbāna et elle s’est fixée sur nibbāna, car elle ne peut pas faire autrement que de se fixer sur ce qu’elle prend. Ainsi, pendant un court instant, parce que la fixation sur nibbāna ne peut pas durer longtemps, Bouddha a connu nibbāna.
nibbāna est un objet très particulier, palpable, touchable, connaissable, par la conscience, mais la particularité de celui-ci est qu’il n’apparaît pas. Comme il n’apparaît pas, il ne disparaît pas non plus. De plus, il est vide, il ne contient rien ; ni son, ni odeur, ni formation, ni quoi que ce soit. Il est vide. Il n’est pas LE vide, il n’est pas le néant. Il est simplement vide de tout ce qui lui est autre. Nous pouvons faire la comparaison avec une pièce vide. Quand on entre dans une pièce totalement vide, il n’y a ni individu, ni meuble. On dit : « Cette pièce est vide ». On ne sous-entend pas que cette pièce est LE vide, c’est une manière de parler, on dit juste : « Elle est vide ». Elle est vide des choses qui, lorsqu’elles y sont nous font dire qu’elle n’est pas vide. Par exemple, il n’y a pas de meubles, il n’y a personne. S’il y avait une chaise, nous ne dirions pas que cette pièce est vide. Parce qu’elle est vide de ce qui habituellement fait qu’elle ne l’est pas, nous disons : « Cette pièce est vide. »
De la même manière, dans le « suññata sutta », Bouddha dit : « nibbāna est vide » et non pas : « Il est LE vide ». Il dit simplement : « Il est vide ». Il est vide de tout ce qui lui est étranger. La conscience pugnace, tenace, qui a cette extraordinaire faculté de coller, d’adhérer, sur tout ce qui passe devant elle, va se projeter sur nibbāna. Mais elle ne durera pas longtemps, elle ne pourra pas rester longtemps collée à nibbāna, parce que nibbāna est vide. Rien n’apparaît au sein de nibbāna, et nibbāna lui-même non plus n’apparaît pas. Lorsque la conscience se projette sur nibbāna, c’est un petit peu comme si elle dérapait, un peu comme si elle glissait. Elle ne restera pas longtemps. Elle ne peut rester tout au plus que quelques minutes, voire quelques heures. Après, elle revient de nouveau à ses « occupations favorites ». C’est-à-dire qu’elle recommence à connaître les phénomènes, les agrégats, dont elle fait partie d’ailleurs. Elle recommence à connaître les auditions, les pensées, les touchers, les goûts, les couleurs, etc.
Parce que la conscience a suivi un processus particulier, dont rassurons-nous Bouddha a pensé avant sa mort à nous laisser la recette, elle va expérimenter la cessation de l’apparition de toutes ces formations physiques et mentales, et va de nouveau se projeter sur nibbāna, sur lequel elle va rester quelque temps et ainsi de suite.
Toutefois, il est certain que cela ne se fait pas tout seul. Ce n’est possible qu’au terme d’un certain effort. Cet effort, Bouddha l’a accompli. Il nous a ensuite enseigné comment nous pouvons le faire à notre tour.
Pour l’être totalement libéré, il arrive un moment, celui de la mort, précisément, où la conscience va se projeter sur nibbāna. Puisque le moment de la mort est venu, elle va arrêter, elle va cesser. À ce moment, il va rester nibbāna, sans aucune conscience résiduelle. Le corps va entrer dans la décomposition habituelle de tous les cadavres, puis tout est terminé. C’est exactement comme la vague qui s’est évanouie sur la plage : L’eau est encore là, le sable est encore là, mais la vague a disparu. Il en est ainsi de l’arahant, de l’être pleinement libéré, de Bouddha. Au moment de la mort, ce qui se passe est simplement un arrêt, cette fois-ci définitif de l’apparition des agrégats. La conscience qui prend pour objet nibbāna n’apparaît plus non plus.
Au terme de notre vie, de notre entraînement, que Bouddha appelle l’entraînement au développement de la présence d’esprit, satipaṭṭhāna, il se peut que nous arrivions à faire la première expérience de nibbāna (cela peut se faire en l’espace de quelques semaines, de quelques mois ou de quelques années). Ce serait déjà merveilleux, ce serait déjà excellent. Ce serait la première fois depuis des temps immémoriaux, depuis des milliards de milliards de milliards d’années que nous tournons en rond, depuis que nous avons été tantôt élève tantôt maître, tantôt homme, tantôt femme, tantôt animal, tantôt humain, que nous verrions nibbāna, que nous atteindrions nibbāna.
Bouddha dit que celui qui a vu nibbāna ne serait-ce qu’une fois, est arrivé à la fin de ses problèmes. Il est arrivé à la fin de ses soucis parce qu’à partir du moment où il l’a vu une fois, inéluctablement, comme suite naturelle faisant partie du processus, un jour ou l’autre, il parviendra au but. Ce ne sera peut-être pas en cette vie, peut-être la suivante, peut-être encore la suivante, tout au plus dans le pire des cas dit-il, au bout de la septième vie, il arrivera à ce moment, à expérimenter nibbāna sans conscience résiduelle. C’est-à-dire ce que l’on appelle parinibbāna.
Nous nous imaginons que l’éveil, c’est une élévation spirituelle, quelque chose de grandiose, de géant, au-delà. Nous croyons que nous sommes petits, que nous sommes trop petits pour y parvenir et qu’il nous faudra longtemps. Et nous nous imaginons que notre gourou lui, y est arrivé. Alors qu’en réalité, nibbāna est là. Il est très accessible, rapidement. C’est juste un phénomène comme un autre. Il est différent des autres parce qu’il n’apparaît pas mais c’est un phénomène comme un autre en ce sens qu’il n’est rien d’autre qu’un phénomène. Tout simplement parce qu’il ne peut rien avoir d’autre, dans ce monde, que des phénomènes. C’est juste un phénomène que nous n’avons encore jamais connu et qui est à notre portée. Bouddha ne cesse de nous le dire. Il nous faut suivre un entraînement, certes un peu rigoureux. Toutefois, celui qui se contente d’appliquer simplement ce que Bouddha a dit, ne peut faire autrement que de parvenir au but final, à la cessation définitive de toute insatisfaction, à nibbāna.
Bouddha a énuméré dix choses qu’un méditant peut prendre à tord pour l’expérience du magga, voire nibbāna :
C’est ce que certains imaginent. Certains disent que pendant le sommeil profond, il y a une phase durant laquelle l’esprit demeure dans son état naturel, qui serait l’état d’éveil.
D’abord, il n’y a pas d’état d’éveil, selon la tradition du theravāda. Donc, nibbāna n’est pas à comparer à ça. De plus, nibbāna n’est PAS un état de conscience.
C’est quelque chose de particulier qui est connaissable, « expérimentable », mais qui n’est pas la conscience. La conscience qui fait l’expérience de nibbāna est encore une conscience conditionnée, fabriquée. Bouddha dit que c’est encore une fabrication mentale.
C’est effectivement une conscience ténue, qui est très comparable à la conscience que nous avons pendant le sommeil profond mais nibbāna n’est pas similaire à l’état de conscience que nous avons pendant le sommeil profond. C’est un phénomène qui est connu par une conscience qui est très similaire à la conscience du sommeil profond. Pourquoi ? Tout simplement parce que lorsque nous sommes dans le sommeil profond, la conscience n’a pas d’objet tangible. C’est-à-dire que toutes les perceptions sensorielles sont momentanément arrêtées.
Bien entendu, cela fait croire que, puisqu’il n’y a plus aucune perception, plus aucune sensation, que Bouddha parle de cessation, que ce doit être ça, l’état d’éveil. C’est très particulier et extrêmement subtil à comprendre. On appelle cela le continuum de vie, de conscience dont la particularité est qu’il n’a pas d’objet tangible ; ni vision, ni odeur, ni son, ni pensée, etc. Néanmoins, ce n’est pas pour autant l’état d’éveil, la nature de l’esprit, etc.
Lorsque la conscience prend pour objet nibbāna, de la même manière, elle n’a absolument aucune perception sensorielle tangible. En ce sens, elle est comparable, mais uniquement dans ce sens. nibbāna n’est pas du tout l’objet que prend la conscience durant le sommeil profond, ni même l’état de conscience expérimenté pendant le sommeil profond. Cet état de conscience, on l’appelle le continuum de vie que, en particulier les Tibétains, tiennent pour une conscience immuable, éternelle, subtile, etc. Bouddha a découvert que non. Il a découvert que c’est une conscience particulière, certes, mais que ce n’est, mine de rien, encore, rien d’autre qu’une conscience.
Cette expérience n’est pas toujours autour de nous, puisque nous sommes conscients ; il y a des sons, il y a des visions, ce n’est donc pas nibbāna. Il y a un travail à faire pour arriver à nibbāna. Ce n’est pas une chose qui soit déjà là, mais momentanément masquée. C’est très particulier nibbāna, très très particulier. Ce qu’il y a LÀ, ce n’est rien d’autre que ce que vous percevez. Cette idée de ce qu’on se met dans la tête, et on a du mal à s’en défaire, qu’il y a quelque chose d’autre, de transcendant, d’invisible, dans les phénomènes est selon Bouddha parfaitement FAUSSE. Il dit, il proclame : « Il n’y a rien d’autre, à un instant donné, que ce que vous connaissez. » Il dit qu’il y a dans ce corps d’un mètre et quelques, la Vérité de la souffrance, la Vérité de la cause de la souffrance, la Vérité de la cessation de la souffrance et la Vérité de la voie qui conduit à la fin de la souffrance. Tout cela est DANS ce corps, DANS ces perceptions. Il n’y a RIEN en dehors, en deçà ou en dedans de ces choses-là.
Seulement, le mental ne peut s’empêcher de les concevoir. C’est sa manière de fonctionner.
Bien sûr. Le mental ne peut pas s’empêcher de concevoir ça. C’est la manière dont les agrégats s’agglomèrent, il en est ainsi. De ce fait, il n’y a pas à juger des maîtres spirituels qui prétendent avoir atteint des états de transcendance, car ils ne peuvent s’empêcher de penser comme ça. C’est comme ça ! C’est la nature. Et nous, nous ne pouvons nous empêcher d’y croire, c’est comme cela que tout fonctionne.
Même si nous ne pouvons pas nous empêcher de concevoir cette unité, cette essence, elle n’existe nulle part ailleurs que dans nos conceptions. Il n’y a pas dans toute la sphère de nos expériences de « porte de sortie ». Selon Bouddha, le monde tourne en vase clos. Il n’y a PAS de porte de sortie, il n’y a pas de trou dans le doigt à travers lequel la lumière va passer.
On ne peut pas ! Comment voulez-vous ? C’est comme si, en prenant votre voiture, vous vouliez quitter le monde. Où que vous alliez avec votre voiture vous serez toujours sur la surface de la terre, c’est une sphère ! Vous prenez un bateau et vous partez à l’aventure, vers des paradis nouveaux… Où que vous alliez, vous serez toujours sur terre puisque c’est une sphère. De la même façon, vous ne pouvez pas sortir de vos conditionnements. L’idée de leur transcendance est une utopie, un fantasme.
Que sont ces disciplines sinon exactement ces conditionnements à l’œuvre ?
Vous avez tout à fait raison de l’être. vipassanā, ou plus exactement satipaṭṭhāna, est la seule chose qui permet effectivement d’arriver à la cessation complète de ce mécanisme.
C’est ce que Bouddha a découvert, il dit : « Il y a bien un chemin ».
Le chemin qu’il a enseigné à l’origine, tel qu’aujourd’hui nous le répétons dans la tradition du theravāda, n’est pas le chemin de la béatitude, de la divinité ou de l’essence, même s’il ne nie pas la possibilité d’y parvenir. D’ailleurs, il encourage ses disciples d’y parvenir. Toutefois, il dit : « Attention, ce n’est pas le but. C’est bien de faire ces choses-là car c’est très vertueux, (il y a beaucoup d’avantages, certes), mais n’en restez pas là ». Les prêtres, maîtres et gourous de toutes religions en restent là, pour peu dans le meilleur des cas, qu’ils y soient parvenus. Ce qui est très peu probable. Beaucoup ne font que répéter ce qu’ils ont appris depuis leur enfance. On leur a mis dans la tête (qu’ils sont l’incarnation d’un être éveillé) bien qu’ils soient censés y être parvenus dans une vie antérieure. Ou encore, à force de croire qu’il n’y a rien à faire, tout est là, tout est spontané, tout est la nature d’éveil, le chien qui fait caca, tac ! C’est Bouddha ! On peut arriver, à un moment donné, à se dire : « Ça y est, je suis entré dans la “danse”, j’ai atteint l’éveil ! »
Sur le chemin de nibbāna, on apprend à mieux aimer ? On parle de développement, de réalisation, d’accomplissement, d’épanouissement intérieur, mais la notion d’amour est importante dans la vie ; aider les autres… Sur ce chemin, on aime d’un amour inconditionné…
C’est justement ça le point intéressant.
Ce n’est pas sous cet aspect qu’il faut le voir. C’est ce que certains ont dit des membres du theravāda : « Ils sont dans leur petit coin, ils font leur truc. » La confusion au départ, tient de ce que certains moines, qui ont suivi l’enseignement de Bouddha, ont réduit cet enseignement à ce que vous venez de dire, parce qu’ils l’ont compris comme ça. Bouddha dit toujours : « Vous êtes seul, il n’y a que vous qui pouvez l’atteindre, personne ne peut le faire à votre place ».
Certains se sont dit : « On va se faire moine, c’est mieux car on a une plus grande pureté, on va s’investir là-dedans. Puis les laïcs qui sont encore plein d’attachements, vont nous faire à manger pendant qu’on médite, pendant qu’on atteint l’éveil. Comme ça, ils se feront du bon karma, et pourront peut-être devenir moine à leur tour la vie suivante. » Ces tendances ont incontestablement existé. Ce sont les personnes qui ont suivi cette tendance-là qui se sont vues mettre l’étiquette, tout à fait justifiée d’ailleurs, d’égoïstes. À l’origine, elles ont déjà dénaturé l’enseignement de Bouddha.
Il y a donc eu une réaction tout à fait légitime de la part de certains, de dire : « Mais attendez ! Bouddha enseigne aussi la compassion, il enseigne aussi la bienveillance, il enseigne l’amour (l’amour universel) et vous, vous faites complètement l’impasse dessus, vous en restez simplement à une vision aride sèche, “la sagesse pure”, “nibbāna tout de suite” etc. » Ces moines appelés « hīnayāna » par les moines sérieux, se sont renfermés d’un côté et d’autres se sont exaltés, en opposition à cela, dans une autre direction, qui du coup est allé un peu trop loin aussi. Ces derniers sont représentés de nos jours par ce qu’on appelle le « bouddhisme moderne » ou « mahayāna ». Tandis que les autres, connus aujourd’hui sous le nom de theravāda, ont continué de suivre tranquillement leur chemin en ignorant magistralement il est vrai, ces « petites querelles » et petites déviations. Ils ne les ont pas ignorés en ce sens qu’ils n’étaient pas informés, ils ont simplement dénoncé cela en disant : « Nous n’avons rien à voir avec ces “hīnayāna” et encore moins avec les “mahayāna”. » À cette époque, les « hīnayāna » constituaient seize écoles différentes, et les « mahayāna » étaient appelés les « mahasamghika ». Les moines du theravāda ont aussi déclaré : « Nous ne sommes ni dans l’extrême plutôt limitatif et restrictif des uns ni dans l’extrême carrément cosmique et transcendant des autres. Nous restons toujours sur la ligne fixée par le Bienheureux. »
Oui, bien sûr, c’est une excellente chose. Bouddha enseigne effectivement des méditations qui permettent le développement de cet amour, de cette compassion.
nibbāna est au-delà, mais si on n’est pas passé par là d’abord, on n’a aucune chance d’y parvenir.
Le theravāda est une voie complète qui a gardé, bien entendu, complètement d’actualité l’enseignement que Bouddha a fait sur la voie de la compassion et sur la voie de l’amour.
Intégral ! Bouddha dit : « Il est parfait en son commencement, il est parfait en son milieu et il est parfait en sa fin. » C’est comme ça qu’il le décrit. Il n’y avait donc pas besoin d’en enlever et encore moins d’en rajouter.
Origine : Enseignement délivré en France
Auteur : Moine Sāsana
Date : 1999
Mise à jour : 27 févr. 2011